Le Cabinet de curiosités de Guillermo Del Toro


Le Cabinet de curiosités de Guillermo Del Toro est une série Netflix de huit épisodes.

Voyons ça en détail.

Lot 36 (réalisation : Guillermo Navarro) : Le plus décevant

Nick Appleton (Tim Blake Nelson, formidable) est un vétéran qui ne manque jamais une occasion de le rappeler. Ce raciste, qui plus est, gagne sa vie en revendant au détail ce qu’il achète en gros aux enchères, notamment dans des garde-meubles dont les propriétaires ne payent plus leur loyer. Évidemment il perd aux jeux bien plus qu’il ne gagne. Un jour, il acquiert le lot 36, un bric-à-brac qui contient des livres occultes, ce qui va l’amener à croiser la route de Roland, un occultiste inquiétant (mais pas forcément des plus compétents).

Cet épisode est le plus décevant des huit, car la prestation de Tim Blake Nelson est de très haute volée : il incarne une ordure et en même temps on ne peut s’empêcher de lui trouver des circonstances atténuantes. Le scénario ne suit pas et finit par verser dans le satanisme éco+.

Graveyard rats (réalisation : Vincenzo Natali) : Le plus nul

Masson est un pilleur de tombes. Il est en compétition avec les rats qui sont parfois plus rapides que lui pour détrousser un cadavre.

Adapté d’Henry Kuttner, cet épisode ne vaut que pour le nom de Lewis Padgett apparent sur une des tombes du cimetière ; pour le reste, c’est affligeant du début à la fin. Une fois de plus, Vincenzo Natali fait appel à son acteur favori David Hewlett qui joue comme une chaussette trouée.

The autopsy (Réalisation : David Prior) : Le meilleur de tous

Un vieux médecin légiste (F. Murray Abraham, dont on se souviendra éternellement pour son rôle d’Antonio Salieri dans le Amadeus de Milos Forman) est appelé dans un village minier pour autopsier les corps de travailleurs victimes d’une étrange explosion souterraine. Ce qu’il va découvrir dépasse l’entendement.

Très bon épisode inspiré d’une nouvelle de Michael Shea (La Revanche de Cugel l’astucieux, La Quête de Nift-le-mince).

The Outside (Réalisation : Ana Lily Armipour) : le plus chiant

Sans doute influencée par ses collègues de travail qui ne parlent que de grosses bites et, en creux, des moyens de les attirer dans un plumard (la table de la cuisine fera aussi bien l’affaire), Stacey essaye une lotion miracle qui doit la rendre magnifique et lui inflige, pour commencer, des rougeurs impressionnantes et des démangeaisons au diapason. Pour quelques centaines de dollars, à peine, la vilaine chenille arrivera-t-elle à devenir un joli papillon ?

Longuet, convenu, dénué de toute subtilité, cet épisode veut nous faire croire que la vraie beauté est à l’intérieur. Le souci, c’est : « à l’intérieur de quoi ? ».

Pickman’s model (Réalisation Keith Thomas) : la plus mauvaise des deux adaptations de Lovecraft (exæquo)

Si donner le rôle du peintre Richard Pickman à Crispin Glover est la vraie bonne idée de cet épisode, malheureusement le reste est une catastrophe industrielle à oublier d’urgence. Il semblerait que les héritiers de Tolkien considèrent comme une « éviscération » l’adaptation du Seigneur des Anneaux par Peter Jackson. Là on pourrait dire pareil. Et ça a sans doute plus de sens.

Dreams in the witch house (Réalisation : Catherine Hardwicke) : la plus mauvaise des deux adaptations de Lovecraft (exæquo)

Rupert Grint (Ron Weasley dans la franchise Harry Potter) est un acteur ? Pas vraiment, si on en croit cet épisode calamiteux. Eviscération 2, le retour de la sorcière.

The viewing (Réalisation : Panos Cosmatos) : le plus stylé

Le riche Lionel Lassiter (Peter Weller) invite chez lui quatre pointures dans leurs domaines respectifs (la musique, le roman, les pouvoirs psys, l’astrophysique) à venir voir un objet qui résiste à toutes les analyses. D’abord tout ce petit monde cause, puis picole, puis s’envoie de la cocaïne spatiale avant – enfin – d’aller contempler le mystérieux caillou céleste au centre de cette intrigue psychédélique.

Panos Cosmatos (Mandy) fait du Panos Cosmatos : c’est complétement what the fuck ?! et en même temps le spectacle est presque hypnotique. Comme sur Mandy, je trouve que le réalisateur ne sait pas gérer le rythme de son récit. Ici il y a une énorme (interminable ?) mise en bouche qui donne sur un festin nu assez vite expédié. Peter Weller fait son âge (75 ans) voire davantage. Sofia Boutella fait du Sofia « perverse soft » Boutella à 101%, personne n’en sera surpris. Si la forme est complètement wahou, le fond reste quand même très léger. Mais bon, Mandy nous y avait préparé.

The Murmuring (réalisation Jennifer Kent) : le plus subtile.

Un couple d’ornithologues s’installe dans une maison à l’abandon pour étudier les phénomènes de nuées des bécasseaux. Il sont en deuil. Il aimerait aller de l’avant ; elle n’y arrive pas.

C’est l’épisode le plus subtile, le plus maîtrisé en termes de narration, le plus « Henry James », mais pas forcément le plus enthousiasmant. Paradoxalement on s’intéresse plus aux phénomènes de nuées (chez les étourneaux, les bécasseaux) qu’au deuil qui frappe le couple. La seule chose qui n’est pas subtile dans l’épisode c’est l’insistance du mari à vouloir retrouver un semblant de vie sexuelle.

Dans son ensemble, la série déçoit. Restent les présentations de Del Toro (inspirées de celles d’Hitchcock) très réussies, même pour les épisodes les plus embarrassants.

Shining Girls, série télé adaptée du roman de Lauren Beukes


Kirby Mazrachi (Elizabeth Moss) a été agressée pendant qu’elle promenait son chien sur une plage de Chicago. Son abdomen a été ouvert en croix et son agresseur a laissé un objet en elle. Elle a survécu.

Dix ans plus tard, une autre jeune femme est agressée de la même façon à Chicago, mais ne survit pas.

Kirby qui travaille comme archiviste dans un journal local, se penche sur l’enquête et demande l’aide de Dan Velasquez (Wagner Moura), un journaliste alcoolique au bout du rouleau.

Ce qu’ils vont découvrir ensemble dépasse l’entendement : un tueur en série opère dans la région de Chicago depuis des dizaines d’années et la police n’a jamais fait le lien entre ses différents crimes au modus operandi pourtant très particulier (une incision en croix, un objet laissé à chaque fois à l’intérieur de la blessure). Ceci étant, Kirby n’a pas dit toute la vérité à Dan Velasquez, car elle ne veut pas finir dans un hôpital psychiatrique. Chaque fois qu’un meurtre a lieu, la vie de Kirby est mise sans dessus dessous : son chat est remplacée par un chien, elle a changé d’appartement ou vit de nouveau avec sa mère, qui elle a changé de métier ou de petit-ami, etc.

Shining Girls est une série qui m’a laissé un sentiment mitigé. C’est un colosse au pieds d’argile – globalement, quand on réfléchit à la seule intrigue policière, elle ne fonctionne pas. J’ai beaucoup aimé Wagner Moura à contre-emploi, fragile, sur lequel on ne peut pas compter, pas même son fils de 13 ans. Les distorsions temporelles sont très bien rendues. Mais voilà, il n’y a globalement aucun suspens, on sait que Jamie Bell est le tueur dès le prologue du premier épisode et toutes les explications sur ce que sont les shining girls ont été zappées. Tout ceci précisé, le pire est ailleurs, c’est Elizabeth Moss qui fait du Elizabeth Moss à 150% et qui est globalement insupportable. A sa dixième grimace de crapaud, j’ai commencé à avoir envie de tirer au .38 sur mon écran plat. Kirby n’est pas attachante du tout et sa quête personnelle y perd beaucoup. Presque sans surprise, le meilleur épisode de la série est celui où elle n’apparaît pas.

Le casting international est résolument étrange : Wagner Moura est brésilien, Jamie Bell est anglais. Tout ce petit monde se concentrant pour essayer de sonner américain avec un succès relatif. A réserver aux fans d’Elizabeth Moss dont malheureusement je ne fais pas partie.

Chapelwaite, Jason & Peter Filardi (série TV)


Années 1850.

Le capitaine Boone (Adrien Brody) vient de perdre sa femme (d’origine asiatique) et se retrouve seul avec ses trois enfants. La grande, Honor, en âge de se marier ou presque, la cadette Loa qui a souffert de la maladie et porte une attelle à la jambe, Tane le petit dernier. Boone vient d’hériter d’une scierie dans le Maine et du domaine de Chapelwaite. Arrivé sur place, il se rend compte que le nom des Bonne n’est pas facile à porter, la famille a très mauvaise réputation, certains lui attribuent la maladie étrange qui a emporté plusieurs villageois. Le retour sur la terre ferme est rude, d’autant plus que les enfants, métis, sont victimes d’acte de racisme. En quête d’une gouvernante, Charles Boone finit par embaucher Rebecca Morgan, une jeune femme célibataire qui se destine à devenir écrivain et a vendu l’histoire des Boone à une publication prestigieuse (ce qu’elle se garde bien de dire).

Il y a un secret à Chapelwaite ; Charles Boone a lui aussi un secret, il se souvient de cette nuit lointaine, il était enfant, où son père a essayé de le tuer.

Chapelwaite est l’adaptation de la nouvelle « Celui qui garde le ver » de Stephen King qu’on trouvera dans le recueil Danse macabre. C’est, et de loin, un des texte les plus faibles du recueil, une sorte d’hommage Lovecraftien bancal écrit à une époque où Stephen King faisait encore ses gammes. Il y est question d’un ouvrage : De Vermis Mysteriis, ou les Mystères du Ver, qui a été inventé par l’écrivain Robert Bloch dans la nouvelle « Le Tueur stellaire » (1935). Petit frère moins connu du Necronomicon, De Vermis Mysteriis est censé avoir été écrit en prison par un certain Ludving Prinn, brûlé vif à Bruxelles par l’Inquisition au XVe siècle ou XVIe siècle ; d’après ses propres dires, Prinn était un survivant de la neuvième croisade (1271-1272).

Une nouvelle d’une trentaine de pages, pas très bonne, voilà donc le matérieu source de la série… autant dire que j’ai abordé celle-ci avec une très grande suspicion quant à sa qualité. Mais très vite cette suspicion a volé en éclats. Les acteurs sont excellents (y compris les enfants ! et en particulier Sirena Gulamgaus). La série est très éloignée de la nouvelle, dont elle s’inspire librement, et ne nous épargne rien des maux de l’époque : racisme, puritanisme exacerbé, superstitions, médecine mise en échec par la maladie, etc. C’est tendu dès le premier épisode et la tension ne retombera jamais vraiment. Si les showrunners se sont amusés avec tous les codes du genre horrifique, on retrouve aussi dans cette série certains mécanismes narratifs qui rappellent Simeterierre et d’autres œuvres de Stephen King postérieures à la nouvelle « Celui qui garde le ver ».

Au final, Chapelwaite est une très bonne série d’horreur, mais je finirai sur une mise en garde, c’est une œuvre d’une noirceur suffocante. J’ai été à plusieurs reprises surpris par la violence (surtout psychologique) de certaines scènes (et il y a aussi de nombreuses scènes de violence physique). Ici il n’y a pas d’humour pour contrebalancer la tragédie et les épreuves que traverse la famille Boone.

Il n’y a pas ou peu d’espoir.

Midnight mass, Mike Flanagan (2021)

… silent night…

Luc 11:11
Concept des Versets

Quel est parmi vous le père qui donnera une pierre à son fils, s’il lui demande du pain ? Ou, s’il demande un poisson, lui donnera-t-il un serpent au lieu d’un poisson ?


Crockett Island.

De nos jours.

L’île a été prospère, portée par la pêche, puis une marée noire a ruiné son économie. Bev Keane a pesé de tout son poids pour que les habitants acceptent les compensations de l’industrie pétrolière, mais le compte n’y est pas, et l’île n’a de cesse de se paupériser, de perdre ses habitants.

Fils de pêcheur, Riley Flynn revient au pays après une longue incarcération. Il a provoqué la mort d’une jeune fille en conduisant sous l’emprise de l’alcool.

Au même moment, un nouveau prêtre arrive à Crockett Island : Paul Hill, qui remplace monseigneur Pruitt, revenu très malade d’un voyage à Jérusalem payé par les fidèles de Crockett Island.

Alors que les premiers miracles ont lieu, suite à l’arrivée du prêtre Hill aux prêches enflammés, Riley, trop cartésien pour son bien, commence à poser les bonnes questions aux bonnes personnes.

Voilà une mini-série, 7 épisodes comme cela va de soi, que j’ai beaucoup aimée. Peut-être pas la plus spectaculaire du catalogue Netflix, mais clairement une des plus attachantes, grâce à sa galerie de personnages : le shériff musulman, le fils prodigue, le père pêcheur (Henry Thomas), la jeune métis en fauteuil roulant (double peine), le prêtre aveuglé par sa volonté de bien faire les choses, la grenouille de bénitier plus néfaste qu’une encéphalite spongiforme…

Midnight mass est une réussite de plus à porter au crédit de Mike Flanagan, le nouveau maître de l’horreur intelligente.

Severance, série TV de Ben Stiller

Souvent le diable se cache dans les détails…

Dans un futur très proche ou un présent parallèle, un procédé révolutionnaire – la dissociation – permet aux travailleurs de ne pas ramener leur travail à la maison et de ne pas ramener leurs soucis familiaux au travail.

Dans le service de Mark (Adam Scott, formidable de bout en bout), son mentor Petey a disparu et va être remplacé par Elly R. (Britt Lower, formidable, bis) qui vient tout juste de recevoir la puce intracérébrale qui permet la dissociation. Deux autres personnes complètent le service du Raffinement des Macrodatas : Dylan l’employé modèle et Irving, le fidèle employé à Lumon (John Turturro, surprenant). Toute la journée, ces quatre-là isolent des chiffres effrayants. C’est un peu comme ramasser des crottes, mais avec un ordinateur. Et s’ils ont réussi leur quota, ils ont droit à une animation de cinq minutes de danse, par exemple, ou un moment gaufres dans le Pavillon de la Perpétuité.

Cette dissociation n’est pratiquée que par l’entreprise Lumon qui ressemble à une secte familiale tordue, celle de la famille Kier (et là tu t’attends à voir apparaître Udo Kier à chaque épisode, c’est malin).

Soyons clair : je n’ai pas aimé Severance. Je me suis souvent ennuyé, mais suis allé au bout parce que je suis faible et parce que je voulais voir si tout ça menait à quelque chose. Arrivé à la fin de la première saison, j’ai l’impression que c’est du Lost / Damon Lindelof, c’est à dire qu’à chaque épisode on rajoute deux mystères / deux incongruités et qu’un épisode sur deux on résout quelque chose, histoire de faire croire qu’on sait où on va et que l’ensemble avance dans la bonne direction. Mais il y a au final tellement de pistes, de fausses pistes, de personnages perdus de vue et de cul-de-sac que le poisson est noyé et avec lui le spectateur qui s’intéresse au fond de la chose plus qu’à la forme. Parce que Severance c’est avant tout un exercice de forme, avec des architectures symétriques, des plans ultra-léchés, du mobilier blanc, des décors verts granny smith ou vert vomi tout droit sorti de L’Exorciste, des éclairages à la con, des couloirs trop étroits et j’en passe. De la poudre aux yeux. Alors oui les acteurs sont très bons (à l’exception notable de Patricia Arquette qui gigote à mon sens à l’autre bout du spectre), mais rien de tout ça ne fonctionne vraiment, c’est idiot, c’est absurde. Et la vérité, à mon sens, c’est que les scénaristes prennent vraiment les spectateurs pour des cons, en touillant leur café froid et en se grattant ostensiblement les couilles. Tout ça se contredit sans cesse, rebondit avec des trucs scénaristiques a priori flamboyants… mais en fait misérables quand on les regarde de trop près, trucs grossiers qui ne sont souvent là que pour déboucher sur une image, un plan, un cadrage top-moumoutte.

Severance critique sans doute le travail en open space, les bullshit jobs, les entreprises trop verticales, Apple, très bien, mais c’est fait avec une prétention des plus pénibles. Avec des artifices qui finisssent par autodétruire la charge (cette phrase est une phrase à la Severance ; si vous l’analysez vraiment vous verrez qu’elle ne veut rien dire et que pourtant vous comprenez ce qu’elle sous-entend).

Bon, comme je suis faible, voire très faible (je suis allé au bout de Lost, c’est dire mon manque de courage moral), je suis à peu près sûr que je vais regarder la deuxième saison de cette série que je n’ai pas aimée, histoire de vérifier que c’est bien du Damon Lindelof de mes deux… ou constater, contrit, qu’en fait je me suis fait avoir comme un bleu.

Faites-vous votre propre opinion. Soyez le vous qui est en vous.

PS : Que ce soit Apple qui diffuse cette série c’est : ou une preuve de leur cynisme absolu ou la preuve aveuglante que Ben Stiller est le plus grand génie de la télévision américaine depuis Bill Cosby.

The Silent Sea – série de science-fiction coréenne


La Terre se meurt.

L’eau potable est devenue la plus précieuse des ressources.

Sur la Lune, dans une station abandonnée depuis six ans après un accident nucléaire qui a tué tout le monde, se trouve peut-être la solution au problème. Alors on envoie une mission à la recherche de mystérieux échantillons.

Bon alors là, je crois qu’on a un winner total. Seule mon immense perversité m’a permis d’aller au bout. Tout est ridicule : la préparation de la mission, le matériel utilisé, la nature du secret lunaire, les liens entre les personnages. Les flash-backs. L’hommage hyperlourdingue à Aliens (détecteur de mouvement, jeune survivante de sexe féminin). J’ai failli m’étouffer avec un bretzel (ce qui est très fort parce que je n’en mange jamais) à plusieurs reprises : la trachéotomie façon tuyau d’arrosage, la scène de l’ascenseur, la scène des plantes (une plante ça n’a pas besoin que d’eau, ça a aussi besoin de lumière et de nourriture), les emprunts aux films d’horreur japonais (la fille au longs cheveux noirs qui court au plafond, bon là elle circule plutôt sur les murs façon cafard cosmique). Je ne vous parle même pas de la gestion de la gravité lunaire et de l’eau qui prolifère (à friser ?). On a l’impression que c’est un enfant de huit ans qui a écrit le scénario après avoir mal digéré son kimchi.

Comment peut-on mettre des milliards de wons pour produire ça ?

C’est sans doute le plus grand mystère de The Silent Sea.

My Name – série policière coréenne

Ça c’est un couteau…

Alors qu’elle s’apprête à fêter son anniversaire toutes seule, Ji Woo reçoit la visite de son père qui appartient à une célèbre organisation criminelle coréenne. Il n’a pas le temps d’entrer dans l’appartement qu »il est abattu par un inconnu. Pour se venger du meurtrier, Ji Woo contacte Mu-Jin Choi, le charismatique chef de l’organisation dont son père était le bras droit et meilleur ami. Démarrant au plus bas de l’échelle criminelle, elle ne va pas tarder à monter les échelons, puis à intégrer la police.

Dans la série « si c’est coréen, c’est forcément bien », My Name rate une marche et se casse la gueule dans les escaliers non sans avoir mollement rebondi dans tous les sens le long de huit épisodes. Rien dans la série n’est original, tout est vu et revu. Pour l’intrigue générale, on pense aux Infiltrés de Scorsese, remake d’un film de Hong-Kong, Infernal affairs. On pense à l’immense New World, pour les combats à l’arme blanche ultraviolents et ses immenses flaques de sang. On pense à tout un tas de trucs qui fait de My Name une indigeste macédoine de polars asiatiques qui ne trouve jamais son ton ou son originalité. Huit épisodes pour raconter ce qui tenait très bien dans un film de deux heures, faut pas pousser. Sans parler de l’histoire d’amour ridicule qui finit par faire surface.

On peut s’en passer sans regret.

Hellbound, série télé coréenne

°

Un phénomène inexpliqué frappe la Corée, Dieu apparaît à certains personnes (mais est-ce vraiment Dieu ?) et leur annonce qu’il ne leur reste qu’un certain laps de temps à vivre. Une fois ce temps imparti évaporé (ça peut être trente secondes comme vingt ans) trois anges (des sortes de gorilles fuligineux) battent le ou la condamné(e) à mort avant de le ou la carboniser. Les membres de la Nouvelle Vérité le clament haut et fort : Dieu en a marre de nos conneries et c’est comme ça qu’Il communique désormais avec nous, envoyant en enfer tout ceux qui lui déplaisent.

Hellbound, outre son hyperviolence (ceux qui ont vu et aimé Squid Game ne seront pas dépaysés), laisse un drôle de sentiment. On ne sait pas trop ce qu’on voit, quel est le message. Est-ce une condamnation des pêchés (oui a priori, mais très vite non), est-ce une condamnation des mouvements religieux (oui, mais la Pointe de Flèche est une sorte de gang qui surinterprète le message de la Nouvelle Vérité plus qu’une religion organisée ou une secte) ? Doit-on y voir une condamnation des réseaux sociaux, oui, mais rapidement non. Du voyeurisme de la téléréalité ? Sans doute.

Tout est très ambigu et la fin complètement inattendue du sixième et dernier épisode donne plutôt envie de poursuivre dans la saison 2 si saison 2 il y aura. Rien n’est moins sûr, car le showrunner Yeon Sang Ho envisage d’abord de poursuivre le webtoon à l’origine de la série.

Décidément, la Corée est en train de se spécialiser dans le registre des série ultraviolentes.

Et même si on se demande parfois si les créateurs savent vraiment où ils vont, cette série est plus que recommandable ; tout comme Squid Game elle fait beaucoup gamberger, et ce n’est pas la moindre de ses qualités.

[Série TV] The Undoing, David E. Kelley (2020)

(Un couple de légendes)

Jonathan Fraser (Hugh Grant) est un spécialiste du cancer pédiatrique, son épouse Grace Fraser (Nicole Kidman) est psychiatre, ils se sont rencontrés à Harvard. Ils se sont mariés. Ils ont un fils de 12 ans. Ils sont beaux, riches, heureux. Un jour Elena Alves, une artiste fauchée, mère d’un garçon de dix ans (boursier), débarque dans la vie de Grace. Cette femme vient tout juste d’avoir un bébé et jure un peu dans l’entourage très snob, très huppé de Grace. Le soir d’une vente aux enchères au profit de l’école privée de leurs garçons, Elena est sauvagement assassinée à coups de marteau, dans son atelier d’artiste. Pour Grace Fraser, la descente aux enfers peut commencer.

Cette série sur l’adultère et la trahison est à la fois banale et prenante. Elle est banale car on l’a déjà lue, vue mille fois et le milieu des new-yorkais très aisés n’est pas l’environnement criminel le plus original qui soit. Elle est prenante car les acteurs (sauf un, j’y reviendrai) sont exceptionnels. Edgar Ramirez dans le rôle du flic agaçant. Donald Sutherland, extraordinaire, dans le rôle du père de Grace. Nicole Kidman, sans fausse note, qui semble avoir trouvé dans le format de série télé son meilleur terrain de jeu. Ils sont tous excellents, parfois éblouissants, sauf un : Hugh Grant. C’est embarrassant tellement il est à côté de la plaque, pas dans le ton, à l’extérieur du tableau. Si on considère que Nicole Kidman a le premier rôle, il a le second rôle, tout tourne autour de son adultère; de ses secrets, de ses mensonges. Et ça ne le fait pas. Pour moi le souci principal c’est qu’il n’est pas doué pour l’ambiguïté, contrairement à Michael Fassbender ou Mads Mikkelsen. Le couple qu’il forme avec Nicole Kidman est assez peu convaincant, il lui manque une flamme, un truc. Une alchimie. Hugh Grant n’a jamais été très bon dans les drames, là il crève le plancher et atteint un niveau de nullité qu’on ne lui connaissait pas.

Grosse erreur de casting.

Je suis donc déçu, et en même temps je suis allé jusqu’au bout sans souci.

Archive 81, série Netflix créée par Rebecca Sonnenshine

🎥

(Résumé pour ceux qui sont restés dans leur grotte ces six derniers mois.)

Dan Turner (Mamoudou Athie) est un spécialiste de la restauration de vieux enregistrements vidéos. Les mains gantées, avec amour, il démonte les cassettes, nettoie la bande, la rembobine, replace le tout dans un support neuf. Il est contacté par le PDG d’une très riche et très discrète entreprise, Virgil Davenport, pour restaurer les enregistrements de Melody Pendras (Dina Shihabi), une jeune femme disparue en 1994 dans l’incendie du Visser, un emblématique immeuble new-yorkais construit à la place du Manoir Vos, lui aussi détruit par un incendie en 1924. Virgil promet 100 000 dollars à Dan et lui fournit tout ce dont il aura besoin dans sa propriété des Catskills. Dan qui a perdu sa famille dans un incendie n’arrive pas à refuser l’offre et commence à restaurer les enregistrements de Melody. A priori c’est un projet de fin d’études sur le Visser, mais visiblement Melody a un autre but, plus secret.

Bon, par où commencer… C’est sans doute la série lovecraftienne la plus réussie qui ait jamais été tournée, sauf qu’elle n’est pas inspirée directement de Lovecraft mais d’un podcast de Daniel Powell et Marc Sollinger. Les éléments qui évoquent Lovecraft sont pourtant légion : la comète qui ouvre un portail vers une autre réalité, la secte bizarroïde qui attend quelque chose d’une entité extraterrestre ou venue d’un réalité alternative, l’idole de pierre cachée dans un meuble, l’importance d’un minéral (fictif) la charonite, etc.

Là où c’est moins lovecraftien, c’est la partie paradoxes temporels (qui semble inspirée de la mécanique quantique) et tout ce qui concerne le snuff movie d’Iris Vos. Si Archive 81 s’était en partie déroulée en Californie en 1924, j’aurais pensé à Tim Powers, qui aime bien les énigmes culturelles, les sectes étranges et les accidents occultes. On se souviendra de l’importance du film perdu Sea Gulls de Josef von Sternberg et Charlie Chaplin dans son roman A deux pas du néant.

Même s’il y a un ou deux points scénaristiques qui m’ont fait tiquer, dans l’ensemble j’ai pris beaucoup de plaisir à voir cette série.

Hautement recommandable.