Vigilante – William Lustig

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[Critique avec spoilers]

Eddie Marino (Robert Foster) est un réparateur de machine outil. Dans le cadre de son travail, il côtoie Nick (Fred Williamson, légende vivante du b-movie, culte, grindhouse et parfois Z) qui a mis sur pied un petit groupe de « vigilante » des vengeurs qui se substituent à la police (débordée, incompétente, trahie par les juges). Un drame touche Eddie, son très jeune fils est tué par des voyous et sa femme est sérieusement blessée.

Vigilante (que je n’avais pas vu depuis vingt ans, sans doute) est un film très étrange. Il suit tout un tas de films sur le même sujet (l’auto-défense) dont évidemment Un justicier dans la ville (1974) avec Charles Bronson. Mais d’autres, plus ou moins connus, comme Le droit de tuer de James Glickenhaus (1980). Ou, chez nous, Tir groupé (1982) avec Gérard Lanvin (film dont la scène d’ouverture traumatisa toute une génération ou presque – et qui renvoie bien des années plus tard à Irréversible de Gaspard Noé). Donc Vigilante est douteux dès le départ, ressemblant à un film d’exploitation, sur un sujet qui ne s’y prête guère. Mais Vigilante surprend a plusieurs niveaux et il a des qualités indéniables (et tout autant de défauts… indéniables). Le côté quasi-documentaire de certaines scènes est très troublant. Le côté réaliste des poursuites en voiture, poursuite à pied, scènes d’action, renforce évidemment ce côté « réaliste »… et en même temps le scénario ne l’est pas, réaliste, il sert une volonté (pas une thèse) mais une volonté de montrer quelque chose : des citoyens brisés par une justice qu’ils ne comprennent pas, dont ils ne comprennent pas les rouages – une justice qui rime avec flagrante injustice. Cette volonté est intéressante, elle fait réfléchir, elle tire le film vers le drame. Le problème c’est que le scénario dérape à un moment vers la satire/la démonstration par l’absurde (alors que le sujet ne s’y prête). Le mécanisme qui met Eddie en prison pour trente jours et l’assassin de son fils en liberté, ce mécanisme est maladroit. Outré, il nous sort du réel. C’est sans doute possible, mais c’est « gros », comme la scène au tout début où le policier idéaliste met en garde Nick et ses amis vigilante devant Eddie, dans un bar bondé : « je sais ce que vous faites ».

Le film surprend aussi par sa construction ; il y a deux histoires en parallèle dans Vigilante : celle d’Eddie et celle de Nick, ces deux histoires divergent, se complètent, et évidemment finissent par se rejoindre, mais ça aurait pu être encore plus fort si le réalisateur avait choisi entre film d’action « d’exploitation » et drame. L’aspect action manque un peu de mordant (elle pâtit de sa dimension documentaire) et l’aspect drame n’est pas assez poussé/réaliste (on imagine le bordel réel que créerait le meurtre d’un enfant de quatre ans par un groupe de voyous, même dans les mauvais quartiers de New York).

William Lustig n’est pas un grand cinéaste ; on lui doit Maniac (1980), film de serial killer sans grand intérêt qui doit son statut culte à l’époque où il est sorti (et à son traitement fauché/craspec inspiré de Massacre à la tronçonneuse – 1975), Vigilante (1983) donc, Maniac Cop (1988) une série B tournée à l’arrache avec un casting plutôt plaisant (Tom Atkins, Bruce Campbell, William Smith), friandise pour esprits pervers, et un Psycho killer (1989), dont j’ignorais jusqu’à l’existence. Contrairement à Abel Ferrara qui a un début de carrière comparable (Driller Killer, L’ange de la vengeance), donc un film de serial killer craspec puis un rape&vigilante, Lustig n’a pas su s’élever et proposer des œuvres plus ambitieuses.

Si on s’intéresse à la façon dont la justice est mise en scène par le cinéma américain, Vigilante vaut le coup d’œil, en tout cas c’est une curiosité, statut renforcé par son positionnement action/drame un peu bâtard.

Un an plus tard, sortait La nuit des juges de Peter Hyams, qui n’est certes pas un grand film, s’inspirait sans doute trop de Magnum Force (1973), mais allait nettement plus loin en termes de réflexion sur la justice.

 

Ash vs Evil Dead – saison 2

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Ash, Pablo et Kelly sont de retour, pour lutter contre les deadlites et essayer de renvoyer le Necronomicon aux enfers. Tout commence à Jacksonville où Ruby (Lucy Lawless) demande de l’aide à Ash, ce qui ne manque pas de piquant. Et donc voilà tout ce petit monde sur la route d’Elk Grove, où tout a commencé, où Ash (considéré comme un dangereux serial killer) va entre autres retrouver son père (Lee Majors, sous viagra) et divers amours de jeunesse.

Excessif, régressif pour le moins, totalement de mauvais goût, franchement immonde, traversé par d’invraisemblables délires caca-prout, cette seconde saison ne nous épargne rien, y compris un headfucking sur un cadavre dont l’immense pénis arbore un Prince Albert (c’est au début, donc ce n’est pas probablement pas du spoil). Au-delà de (ou grâce à) toutes ces outrances, la série reste drôle. Les acteurs ne se prennent pas au sérieux, en font des tonnes (voire des mégatonnes) et jouent volontairement avec leur image (Lee Majors en vieux qui saute sur tout ce qui bouge, Lucy Lawless embrassant une femme). Les scénarios sont capillotractés, pleins d’incohérences diverses et variées, mais parfois aussi extrêmement inventifs. Sur la fin de la saison, les scénaristes jouent un peu trop la carte du fan service en revenant sur un lieu emblématique de la franchise (je n’en dis pas davantage).

On notera la présence de Ted Raimi (frère de) dans cette saison 2 qui incarne un barman vétéran de la guerre du Golfe complètement taré et qui semble défoncé en permanence  (il est plutôt hilarant).

C’est con, ce n’est peut-être pas aussi bon que c’est con, mais c’est quand même bon.

 

I’ll follow you down / Le chemin du passé

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Un scientifique de haut-vol (Rufus Sewell), disparaît peu après son arrivée à Princeton. A l’aéroport de Toronto, sa femme (Gillian Anderson) et son fils Erol l’attendent, puis le cherchent, essayent de comprendre le mystère de cette disparition. Douze ans plus tard, Erol (Haley Joel Osment), devenu un brillant étudiant en physique, retrouve la trace de son père, dans un journal de 1946 : il a été assassiné dans une ruelle.

I’ll follow you down est un film de science-fiction sans effets spéciaux, sans explosions, sans fusillades à la con. C’est loin d’être un film parfait, mais il compense ses petites faiblesses budgétaires (et scénaristiques) par une galerie de personnages « réels », complexes, vivants.

Erol est supposé être un génie et j’avoue que la façon dont il résout tous les problèmes que pose le voyage dans le temps de son père est tellement inattendue que ça m’a laissé comme deux ronds de flanc. Tout le film semble construit pour arriver à cette scène, ce climax. Et, ma foi, sur ce plan, c’est très réussi.

Moins frappadingue que l’excellent Safety not garateed de Colin Trevorrow, moins romance à l’eau de rose que Quelque part dans le temps, moins tire-bouchonné que Primer, I’ll follow you down est un chouette petit film de SF qui mérite qu’on lui donne sa chance. Il contient d’excellentes idées de SF, mais ce n’est pas là où il excelle, c’est un film qui nous montre cruellement à quel point il est difficile de concilier deux vies qu’on souhaite évidemment réussies: sa vie personnelle et sa vie professionnelle.

 

A monster calls / Quelques minutes après minuit

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Un petit garçon, trop vieux pour être enfant, encore trop jeune pour être un homme, fait un cauchemar à minuit et sept minutes. Ainsi l’histoire commence, avec une église qui s’effondre et un arbre monstrueux (Liam Neeson, pour la voix en VO) qui va bientôt lui raconter trois histoires. L’enfant devra conclure par une quatrième histoire : la sienne, la vérité.

Waouh !

Non ?

Si si.

Waouh !

Franchement, je cherche un défaut à ce film, mais là je ne vois pas (ou il me faudrait être d’une horrible mauvaise foi et pinailler sur une pointe de pathos en trop ici, un monstre qui ressemble trop à un ent là – mais, ne pinaillons pas ! le film est waouh !). On est transporté par l’émotion. Les effets spéciaux (une bonne moitié du film) sont enfin utilisés intelligemment pour raconter quelque chose de profond et non pour en mettre plein la vue.

Il y a des scènes magnifiques de justesse, des scènes qui font rire, des scènes qui vous nouent le cœur, et des scènes qui vous font pleurer tout le sel de votre corps. Expliquer pourquoi ce film est formidable ce serait détruire sa force : essayez de le voir en en sachant le moins possible à son sujet.

Waouh !

A voir ABSOLUMENT en VO pour profiter de la voix profonde de Liam Neeson. Et un dernier petit conseil : regardez attentivement les « photos familiales » chez la mère et la grand-mère, vous aurez peut-être une étrange surprise…

 

PS : De Juan Antonio Bayona, j’avais vu L’Orphelinat que je possède en DVD quelque part dans ma montagne aux trésors (vite, ma pioche ! mon royaume pour une pioche !), mais je n’en ai aucun souvenir, aucun. Une « seconde chance » s’impose.

 

A Cure for Wellness / A Cure for Life

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Un jeune col blanc de Wall Street (Dane DeHaan, parfait dans le rôle) est envoyé dans un sanatorium de Suisse pour récupérer M. Pembroke, le patron de sa firme qui doit signer d’importants papiers avant que l’action ne s’écroule définitivement. Dressé au sommet d’une colline, comme le château de Frankenstein, comme le château du comte Dracula, avec un village à ses pieds, le sanatorium est dirigé par le docteur Volmer (Jason Isaacs, fidèle à lui-même – donc impeccable d’une certaine façon). Alors que Pembroke n’est pas décidé à rentrer à New York, Lockhart (le jeune col blanc) découvre un endroit de plus en plus inquiétant. Un terrible accident de voiture, sur le chemin du village, l’oblige à rester malgré lui au sanatorium. Ce n’est pas très important, lui dit-on : personne n’a jamais voulu en partir. Car ici tout le monde est heureux.

A Cure for Wellness est une étrange salade composée de Frankenstein, du Cauchemar d’Innsmouth et de certains ressorts narratifs chers à l’écrivain Ira Levin. Le tout placé dans une Suisse ensoleillée où Rammstein entre en collision avec une médecine steampunk, très XIXe siècle parallèle. Rajoutez à cela une durée inconcevable de 2H26 et, a priori, vous avez tous les ingrédients pour un pot-pourri… plus pourri qu’autre chose. Eh ben, non, ce n’est pas si simple. D’abord A Cure for Wellness est un film d’horreur, un vrai, et donne parfois l’impression d’être le film d’horreur le plus cher de l’histoire du cinéma. Dire que les décors sont réussis est un euphémisme. Tout y est baroque, grandiloquent, mais aussi steampunkisant. Souvent étonnant, sur le simple plan esthétique (il y a des idées à la Terry Gilliam dedans, le Terry Gilliam de Brazil / L’Armée des douze singes). C’est aussi un film « pour adultes », avec des thèmes extrêmement ambigus voire perturbants : inceste, expérimentations scientifiques (avec d’inévitables réminiscences nazies), exploitation du mal-être. Et des scènes à l’avenant : masturbation, nudité (principalement de personnes âgées), menstrues et j’en passe (je ne veux pas spoilier les deux scènes à la limite du soutenable) . J’avoue que je ne m’y attendais pas, pas dans un film à quarante millions de dollars de budget. Effet de surprise garanti. La mise en scène est volontiers impressionnante – on pense au Shining de Kubrick, excusez du peu. Et le film est traversé par un humour tordu, érudit. Tout ça est plein de clins d’œil, de portes dérobées, de petits coups de coude littéraires dans les côtes, etc.

Le résultat final est certes trop long (2h26 ! Sérieux ?), mais la richesse de l’ensemble compense en grande partie sa longueur. Et si le réalisateur cède à certaines facilités (Jason Isaacs dans le rôle du « méchant » de service), il rend hommage à un cinéma américain « adulte » qu’on croyait perdu corps et âme. Et à un cinéma Hammer&co qui n’a jamais eu autant de moyens financiers.

Une dernière chose m’a frappé, les meilleurs films « lovecraftiens » sont presque toujours ceux qui abordent l’univers de Lovecraft d’une façon oblique ou détachée, comme L’antre de la folie de John Carpenter (un des rares scénarios du producteur Michael de Luca). Même s’il est situé en Suisse et ne contient aucun Grand Ancien (en dehors du Capital), A Cure for Wellness devrait plaire aux fans de Lovecraft.

Split, M. Night Shyamalan

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Un homme (James McAvoy) kidnappe trois jeune filles sur un parking, puis les séquestre. Peu après, des personnalités dissociées de cet homme (qui en possède 23, tant qu’à faire) envoient des emails à leur thérapeute le Dr Fletcher, des appels à l’aide. La Bête est sur le point d’être invoquée.

[Attention spoilers majeurs plus avant!]

A aucun moment, je n’ai réussi à rentrer dans ce film [par contre, j’ai beaucoup pouffé, c’est aussi une façon d’apprécier le spectacle].

Les réactions des trois jeunes filles me semblaient totalement illogiques (au moins une d’entre elles est chaussée de chaussures à talons aiguille, dont on sait que l’accessoire comporte une tige en acier pour supporter le poids d’une américaine, et aucune d’entre elles n’imagine d’utiliser l’objet comme arme – enfoncé jusqu’au cerveau, à travers le globe oculaire par exemple). Quand elles prévoient d’allier leurs forces pour maîtriser le kidnappeur, Casey dissuade les deux autres. Au début du film, cette même Casey a tout le temps de s’élancer hors de la voiture et d’appeler à l’aide pendant que l’identité Dennis gaze ses deux copines ; elle ne le fait pas. L’une d’elle pourrait essayer de séduire Dennis avant de lui tordre/mordre/arracher (ou que sais-je) les testicules, mais non, on va plutôt attendre.

Dennis est obsessionnel de la propreté, mais il laisse les trois filles dans le même endroit, et laisse à l’une d’elles ses chaussures à talons. Pour quelqu’un de si méticuleux, il n’a pas beaucoup réfléchi aux contraintes d’un triple kidnapping.

Quand l’identité Hedwig, sept ans, fait surface, Casey se sert de l’occasion davantage pour comprendre la situation que pour s’échapper. Son comportement nous est expliqué par un tas de flash-backs, mais c’est quand même dur à avaler. Selon la thèse du film, Hedwig a la force d’un enfant de sept ans, c’est sans doute le bon moment pour lui défoncer le crâne. Mais Casey ne pourrait pas faire une chose pareille.

Trois jeunes filles ont disparu (un événement de portée nationale) et le Dr Fletcher ne fait pas le lien avec les tombereaux d’emails qu’elle reçoit.

La police/FBI est totalement absente du film, on ne trace pas les téléphones portables, on ne cherche pas la voiture, on ne passe pas au peigne fin la liste des délinquants sexuels répertoriés, on ne regarde aucune caméra de surveillance, etc. Vaut mieux être kidnappé en France.

Et puis le film bascule dans le fantastique ; c’est clairement la meilleure idée du film, sauf qu’il faudrait être dans le bain pour que ce basculement ait un réel impact. Sur moi, il n’en a eu aucun, ou plutôt : « ah, c’était une chouette idée, dommage que ce soit M. Night Shyamalan qui l’ait eue. »

La performance de James McAvoy sent tellement la performance (panneaux clignotants, gyrophares, sirène – une scène sur deux) que je l’ai trouvée franchement plus drôle qu’inquiétante. Regardez regardez comme je fais bien l’enfant de sept ans, regardez maintenant je porte une robe et des talons hauts. Il y avait tout un truc – plus subtil – à faire sur le rituel des changements de vêtements, Shyamalan passe à côté. 

Bon, et la cerise sur le gâteau, c’est la dernière scène avec Bruce Willis. Ah ah ah !

 

 

A girl walks home alone at night

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Le premier western iranien vampirique…

Étonnant film d’Ana Lily Amirpour tourné en Californie. On y suit un jeune homme, son père junkie, une prostituée, un dealer, un chat obèse, un enfant curieux et… cette fille (Sheila Vand) qui rentre chez elle, à Bad City, toute seule.

Le rythme est un peu lancinant, mais il participe à la réussite du projet. Amirpour a le sens du cadrage, de la mise en scène, mais son N&B atteint un peu ses limites dans certaines scènes nocturnes. Impossible de ne pas penser au Rumble fish de Coppola et aux romans (non vampiriques) de S.E. Hinton.

Epuré, porté par l’interprétation de Sheila Vand qui évoque Charlotte Gainsbourg jeune, A girl walks home alone at night est – dans le style bizarrerie vampirique – une chouette surprise, même s’il n’atteint pas la terrible efficacité du Morse de Tomas Alfredson.

Le chat joue très bien.

 

Daemone, dans les lectures de Xapur

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 » Le roman est la version revue, corrigée et approfondie d’une ancienne nouvelle de l’auteur, on notera quelques descriptions plus élaborées, qui tranchent un peu avec le fond « pulp » de l’histoire (parties rajoutées qui témoignent de l’évolution de l’écrivain ?).  Issu d’un corpus en gestation de 26 (!) textes, à venir (ou pas ?), j’en reprendrai bien quelques histoires. « 

Blood father, Jean-François Richet (2016)

bloodfather

Link (Mel Gibson, magistral) a fait de la prison, longtemps, s’en est sorti, s’est sorti de la bouteille aussi (deux ans qu’il n’a pas bu une goutte d’alcool). Dans sa caravane pourrie, il tatoue les inconscients qui sont prêts à lui confier leur peau. Et puis un jour tout bascule, la fille disparue de Link réapparaît, elle est dans la merde, elle a un tué accidentellement son « boyfriend », un petit caïd mexicain affilié au cartel de Juarez.

Blood Father surprend par son incroyable manque d’ambition. Richet qui avait signé les deux excellents Mesrine, ne rejoue pas dans la même catégorie, il n’essaye pas de reproduire son hallucinante scène d’ouverture du diptyque avec Vincent Cassel en Mesrine. Avec ce Blood father (adaptation du roman Père de sang, de Peter Craig, projet longtemps associé à Sylvester Stallone devant et derrière la caméra), il s’essaye à quelque chose de plus « miniature », sans doute plus dense en matière de psychologie et de rapports humains.

Le casting est très réussi : William H. Macy en sponsor A.A. de Link, Erin Moriarty dans le rôle de la fille qui s’est plongée dans la merde jusqu’aux narines, Diego Luna en mafieux mexicain trop gourmand et Miguel Sandoval en rôle de parrain mexicain totalement hallucinant (cet acteur, beaucoup vu à la télé, est sans doute passé à côté d’une grande carrière). Seul Michael Parks en patriarche magouilleur néonazi détonne, il se croyait sans doute sur le plateau de Tarantino ou de Robert Rodriguez, le décalage s’avère pénible.

Blood father est excellent là où on ne l’attend pas : Mel Gibson qui fouille dans le sac de sa fille, trouve des tampons et des préservatifs et se rend alors compte, pour la première fois, que sa petite fille disparue à quatorze ans est devenue une jeune fille de dix-sept ans qu’un petit truand mexicain a prise dans tous les sens pendant quelques mois. La scène où il lui explique qu’elle finira par faire le tapin au sud de la frontière si elle n’arrête pas ses conneries et toute aussi brutale que pleine d’amour paternel.

Sans surprise, sans grande ambition, sauf celle de livrer un chouette polar sans gras, réduit à l’essentiel, Blood Father finit tout à fait logiquement comme un film de Clint Eastwood : sur l’importance de la passation. Avant cela, Richet réalise quelques belles scènes américaines, de désert et de « trailer park ».

Mineur mais agréable.

Kamui, le ninja solitaire

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Kamui est un shinobi (ninja) en fuite. Il a beaucoup tué, même des femmes et des enfants. Mais il a changé ; désormais, il ne tue (beaucoup) que pour se défendre. Sa route le fait croiser celle d’un pêcheur qui vient de trancher (d’un coup de hachette) la jambe du cheval de chasse du seigneur local (oui, je sais, c’est improbable, mais il y a une raison, même si elle est pour le moins tirée par les sabots). Réfugié sur l’île du pêcheur, Kamui tombe amoureux de sa fille (celle du pêcheur) Sayaka (qui a 13 ans si mes comptes sont bons, ah les Japonais, fuyez le naturel… à moins que j’ai un problème avec l’arithmétique, c’est possible aussi). Evidemment rien ne dure, surtout pas le bonheur.

Kamui, le ninja solitaire m’a été conseillé par un dessinateur de BD connu, parce que les films de sabre, c’est mon truc, ou un argument irréfutable du même genre. Je tais l’identité du coupable par pure charité bouddhique (et il ne se reconnaîtra pas, puisqu’il n’a pas d’ordinateur – reste la possibilité peu probable, « étroite » comme on dit à Pattaya, que je sois dénoncé par une personne capable de surfer sur internet, d’identifier ensuite le dessinateur technophobe et de l’informer alors qu’il (le dessinateur technophobe) n’a pas d’ordinateur que je me paye un peu sa poire sur mon blog, mais en toute amitié respectueuse).

Donc un spécialiste des pinceaux me le conseille et je l’achète, en DVD, au prix exorbitant de 6,79 euros port compris. Et là, c’est le drame : parce que Kamui, le ninja solitaire est un navet, japonais certes mais navet avant tout. Je ne sais pas si on peut dire un wasabi. C’est trop tentant : Kamui est un wasabi. On s’en doute déjà avec les bande-annonces, impossibles à zapper, qui introduisent le film, sans vaseline. Des trucs (enfin des films à budgets aléatoires pour le marché parallèle des stations-service), je savais même pas que ça existait. A un moment, j’ai vu Tom Hardy jeune, et j’ignorais qu’il avait commencé à tourner avant d’avoir son permis de conduire.

On connaissait, depuis Tigre et dragon, et même avant (pour les plus chanceux d’entre nous), les Chinois qui volent. Dans Kamui il y a des Japonais qui volent, façon Emirates, sur longue distance, petit-déjeuner compris. Il y a aussi des animaux dans Kamui (le réalisateur a un truc « malsain » avec les animaux) : cerfs, sangliers, requins, oiseaux de mer. Tous générés par un ordinateur mongolien souffrant de la maladie de Parkinson.

Les acteurs jouent comme des fans de manga sous psilo invités à un cosplay financé par Justin Bieber. Tout en retenue, donc, comme vous l’avez parfaitement compris. Un peu comme Sean Penn en roue libre. Mais en pire (contre-attaque ?).  A un moment, on voit débarquer Eduardo Noriega, sauf que non c’est son clone japonais ! (à barbiche).

Cerise sur le gâteau, ça dure presque deux heures.

Le meilleur moment : le sashimi de requin à la Naginata (n’essayez pas chez vous, sauf si vous habitez le siège d’une agence de cotation en bourse).

(Ce chef d’oeuvre qui fait passer La porte du paradis de Michael Cimino pour une comédie avec des gendarmes et des naturistes de gauche, m’a permis de créer une nouvelle catégorie pour ce blog : navet).

Merci l’artiste !