Corée 1915. Le pays est occupé par les Japonais. Chez l’envahisseur, un haut-gradé décide coûte que coûte de mettre un terme au règne du Seigneur de la montagne, un énorme tigre borgne dont le poids est estimé à plus de 400 kilos. Pendant la traque, la femelle et les deux petits du tigre sont tués par des chasseurs employés par les Japonais. La vengeance du tigre, devenu le dernier de son espèce, sera terrible.
Dans sa petite maison au pied de la montagne, où il vit seul avec son fils, à l’écart du village, un vieux chasseur (Choi Min-Sik) se tient le plus loin possible des événements ; il a un passé avec ce tigre, il a mis fin à leur guerre des années auparavant, quand sa femme est morte. Mais l’histoire ne va pas tarder à rattraper le vieil homme.
The Tiger est un film particulièrement clivant, c’est un mélange de drame familial, de fresque historique, de film de monstre (pur et dur) et de film d’horreur (oh oui !). Le réalisateur fait fi de tout réalisme en matière d’éthologie du tigre (ou du loup) : il raconte un conte, une histoire, une mythologie forgée dans les tripes, la neige et le sang. Il raconte la mort d’un monde magnifique et l’avènement d’un nouveau monde qui l’est moins. Certains trouveront le film trop long, les effets spéciaux digitaux trop voyants (ce n’est pas faux), certains le trouveront trop sanglant (c’est vrai que le réalisateur n’y va pas de main morte), certains trouveront que le patriotisme remonte un peu trop à la surface de l’histoire (oui, bien sûr). The Tiger est clairement un spectacle too much où la beauté des paysage alterne avec les scènes de massacre. Il y a quelque chose de cathartique dans cette débauche de geysers de sang, d’amputations et d’éviscérations. C’est aussi un film bouleversant qui nous confronte à une des agonies les plus éprouvantes de l’histoire du cinéma.
J’avais beaucoup aimé le précédent film de Park Hoon-Jung, New World. Celui-ci m’a aussi beaucoup plu, mais il est à réserver aux gens qui acceptent de voir les combattants voler dans les film chinois, qui acceptent qu’un tigre puisse dialoguer avec un chasseur, même si ce dialogue ne passe pas par des mots. Park Hoon-Jung affronte sans doute le genre le plus dur qui soit, celui du récit mythologique, universel. Avec une ambition qui fait plaisir, avec une audace que beaucoup lui reprocheront, il livre son Moby Dick. Et pour ça, il lui sera beaucoup pardonné.