Magic, Richard Attenborough (1978)

Corky (Anthony Hopkins) est un magicien de music-hall. Il fait des tours de cartes et le succès n’est pas au rendez-vous. Un jour, tout change pour lui, il apparaît sur scène avec une poupée de ventriloque, Fats. Une poupée obnubilée par le sexe, aux réparties « limites » pour le moins. Le succès est assuré ; le duo attire l’impresario Ben Greene (Burgess Meredith) qui souhaite faire de Corky, ou de Fats, une vedette de la télévision. Il y a un problème : pour ça Corky doit se soumettre à un examen médical qu’il refuse obstinément.

Corky a un secret et un amour secret. Incognito, il retourne dans les Catskills retrouver son amour d’enfance, mariée à une brute prénommée Duke.

Magic est un des films les moins connus de l’acteur et réalisateur Richard Attenborough (Ghandi, Un pont trop loin, Chaplin, etc.). Souvent présenté comme un film d’horreur, il s’agit avant tout d’un drame, de l’histoire d’un homme qui échoue à avoir une vie normale et à connaître le bonheur. Anthony Hopkins, à la voix si caractéristique (en VO), est plus que convaincant : il est totalement bluffant dans son rôle de ventriloque en grande détresse psychologique. Par ailleurs, la poupée et la façon dont elle est manipulée sont sidérants ; on oublie parfois qu’il ne s’agit que d’une poupée de ventriloque.

Beau film d’amour tragique, Magic est tiré d’un roman de William Goldman (Magic, 1976, publié en 1977 chez Albin Michel).

The Fountain, Darren Aronofsky (2006)

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Le Livre :

L’Espagne est à feu et à sang. L’Inquisiteur veut raffermir son pouvoir contre la reine Isabel. Afin de contrecarrer ses plans, elle envoie son meilleur conquistador au Guatemala, pour trouver l’Arbre de Vie.

Le Présent :

Isabel se meurt du cancer. Il ne lui reste qu’un chapitre de son dernier livre à écrire. Son mari Thomas fait tout pour trouver un remède contre son cancer, mais il va trouver autre chose, en inoculant à un singe un peu d’écorce d’un arbre étrange originaire du Guatemala. Alors que l’inéluctable frappe à la porte, Isabel ose l’impensable, elle demande à son scientifique de mari de finir son roman. « Finis-le ».

L’Ailleurs : Thomas vit en symbiose avec l’Arbre, dans un futur, un au-delà (Xibalba), une dimension lointaine. Où il ne reste qu’eux.

J’ai beaucoup de mal avec le cinéma de Darren Aronofsky. Si l’homme est résolument talentueux, il est aussi très prétentieux. Et ses films me mettent souvent mal à l’aise, pour de mauvaises raisons. Requiem for a dream me semble manquer terriblement de sincérité. Black Swan fait preuve d’une certaine complaisance. Mother est aussi irritant que fascinant. Mais il y a deux exceptions : The Wrestler, que j’ai trouvé très bon, très humain, et The Fountain qui malgré ses limitations de budget reste pour moi le meilleur film de Darren Aronofsky… et de très loin. Certains glousseront sur la partie mystico-futuro-branchouille du film (Hugh Jackman dans la position du lotus). Mais en fait, elle est presque secondaire. L’essentiel est ailleurs : jusqu’où où êtes-vous prêt à aller pour sauver la personne que vous aimez le plus au monde. Le Patient anglais nous a donné une réponse, The Fountain nous en donne une autre. Plus métaphysique.

Bon, je dois maintenant l’avouer : j’adore ce film.

The North water (série télé)

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Le médecin militaire Patrick Sumner (Jack O’Connell), dégradé dans le déshonneur, a beaucoup à cacher ; sa dépendance au laudanum n’est pas le moindre de ses secrets. Pour gagner sa vie, il s’invente une histoire notariale compliquée (en Irlande) qui prendra un an à être résolue et embarque comme médecin sur un baleinier. Personne n’est vraiment dupe, mais le bateau a besoin d’un toubib. A peine embarqué, Patrick fait la connaissance d’un des hommes d’équipage, une brute du nom d’Henry Drax (Colin Farrell) que tout le monde semble respecter ou craindre. Tout de suite une puissante animosité se crée entre les deux hommes ; elle n’aura de cesse d’aller crescendo, car Patrick en est convaincu : Drax est le diable incarné.

The North Water est une mini-série anglaise en cinq épisodes d’une brutalité qui laisse pantois. Elle rappelle beaucoup par certains aspects Taboo, mais avec moins d’envolées romanesques. D’ailleurs on retrouve l’excellent Stephen Graham dans un des rôles principaux, ici celui du capitaine. Énorme, bouffi par l’alcool, d’une perversité suffocante, Drax est incarné par un Colin Farrell tout à fait mémorable, dont la prestation, plus bestiale que diabolique, rappelle certaines performances maintenant anciennes de Robert de Niro. The North Water est brutal, c’est aussi une série crue, qui n’épargne aucun détail sordide au spectateur, par exemple quand un mousse est violé et qu’il a besoin de soins douloureux au niveau de l’anus. Mais le plus dur est ailleurs, dans les scènes de cruauté envers les animaux, notamment les phoques, puis une baleine.

Le spectacle monte en puissance et les deux derniers épisodes (dans le grand nord) sont tout simplement ahurissants.

Une série d’une rare tension émotionnelle, très épurée, qui va à l’essentiel et laisse un souvenir durable.

Pig, Michael Sarnoski (2021)

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Rob vit seul avec son cochon-truffier dans les forêts de l’Oregon.
Au volant d’une Camaro jaune dont ne voudrait pas un dealer de crack qui se sèvre à la cocaïne, Amir vient régulièrement échanger les truffes récoltées contre des vivres.
Un jour, Rob est agressé et son cochon lui est dérobé.
Pour le retrouver, il va devoir retourner à Portland, là où gît son glorieux passé.

Et je n’en dis pas plus, car ce serait gâcher le plaisir qu’on a à voir ce film qui se pèle comme un oignon, qu’on découvre peau après peau.
Ça pourrait être un bête remake porcin de John Wick, ce dont le réalisateur semble avoir une conscience aiguë (tout comme il rend hommage au True Romance de Tony Scott de façon assez subtile), mais pas du tout, Pig n’est pas un énième film de vengeance où Liam Neeson tue tout le monde parce que quelqu’un a uriné sur sa pelouse. C’est un grand film américain, ramassé, aiguisé, d’une heure et trente et une minutes. Probablement ce que le cinéma américain est capable de produire de mieux actuellement. Un film avec du fond, de la matière, de la chair humaine, du drame. De bons acteurs, de bons dialogues (parfois excellents comme la scène à glacer le sang qui se déroule au Finway ; je n’en dis pas davantage). Le réalisateur se livre à une réflexion extrêmement cruelle sur ce qui fait le succès, le bonheur… et parfois l’impossibilité d’avoir les deux à la fois.
L’argument comme quoi Pig serait le film de la résurrection de Nicolas Cage est à pisser de rire. Tous les deux ou trois ans, Nicolas Cage livre une performance hallucinante et/ou excellente… Mandy en 2018, Joe en 2014, j’en passe et des meilleurs… Il tourne dans beaucoup de mauvais films, voire des trucs franchement embarrassants comme le remake de Wicker Man, mais pas que. Dans Pig, Cage s’essaye avec un grand succès à la sobriété.

Je conseille ; j’ai beaucoup aimé.