
Quelque part en Amérique du sud, dans une concession américaine, un puits de forage de pétrole prend feu. La dynamite qui se trouve à 300 kilomètres de là, et qui est censée souffler l’incendie, n’a pas été retournée depuis un an. Les bâtons du haut ont séché et de la nitroglycérine très instable s’est accumulée au fond des caisses. La compagnie cherche quatre chauffeurs expérimentés et prêt à tout pour 20 000 pesos. Ils devront transbahuter la nitro à travers la jungle, sur une des pistes les plus dangereuses du monde. Quatre hommes, donc, pour une mission-suicide. Il y a Nilo (Francisco Rabal), le tueur à gages, Serrano (Bruno Cremer), le banquier véreux, Kassem (Amidou) le terroriste recherché par la police israélienne et enfin Scanlon (Roy Scheider), une petite frappe condamnée à mort par la mafia new-yorkaise après un casse qui a mal tourné.
Sorcerer (Le convoi de la peur en VF) est une nouvelle adaptation du roman de George Arnaud Le Salaire de la peur, adapté une première fois en 1953 par Henri-Georges Clouzot (à qui Friedkin a dédicacé sa version). Souvent considéré comme le chef d’œuvre de Friedkin (ce dont on peut raisonnablement douter), c’est un film déroutant quand on le voit la première fois. En effet, le réalisateur présente chacun de ses personnages dans un prologue plus ou moins long, quelques minutes à peine pour Francisco Rabal, beaucoup plus pour les autres. Par conséquent, le début du film, peut sembler décousu. Et sa réelle dramaturgie ne s’installe que vers la quarantième minutes. A partir de là, le long métrage n’a de cesse de monter en puissance. Des scènes incroyables, comme celle de la traversée du pont de cordes (trois mois ! de tournage pour cette seule scène), s’enchaînent jusqu’au final d’une incroyable noirceur. Étonnamment la musique de Tangerine Dream s’inscrit très naturellement dans le projet cinématographique de Friedkin.
C’est un monde d’une immense laideur qui nous décrit où tout est pourri, corrompu, en décomposition, où la rouille, la moisissure, la sueur et la boue règnent en maître. Dans ce monde-là, des hommes se dressent pour tenter de s’en sortir ou mourir en beauté. On ne sait pas trop, la motivation de chacun reste ambigüe et la rédemption n’est pas forcément la réponse à leur quête personnelle.
Un film d’une rare puissance que je conseille sans réserve.