Destroyer, Karyn Kusama (2018)

Destroyer

Erin Bell (Nicole Kidman) est une flic qui a des problèmes de flic et des problèmes de mère. D’une certaine façon, elle est au bout du bout du bout. Sa gueule pue l’alcool, sa démarche pue l’alcool, ses collègues soit la plaignent soit se foutent ouvertement de sa gueule (cela dit « ceux qui savent ce qu’elle a enduré » la plaignent). La fille d’Erin, âgée de seize ans, part en vrille, elle a plus ou moins abandonné ses études et traîne avec un connard plus âgée qu’elle, avec qui elle fait la tournée des bars. Un jour, Erin reçoit par la poste, à son bureau, un billet marqué, résultat d’un braquage qui a mal tourné (euphémisme). Ce billet taché de violet va la renvoyer des années et des années en arrière… quand elle était flic infiltrée dans un gang de Los Angeles et essayait de faire tomber Silas (Toby Kebbell).

Destroyer est un géant aux pieds d’argile. Le film s’effondre (et se vautre) pour pas grand chose. 1/ une erreur scénaristique si grosse qu’elle laisse pantois, d’autant plus que toute l’audace du film tient sur la scène (d’ouverture) durant laquelle a lieu ladite erreur. 2/ la performance forcée de Nicole Kidman, qui au jeu du avant (belle) et après (Bell défoncée), fait le job, tout en faisant  sans cesse penser à la prestation de Charlize Theron dans Monster de Patty Jenkins. Destroyer est raté, se traîne un peu (deux heures), mais reste attachant. On se surprend à pardonner beaucoup à Karyn Kusama qui tente quelque chose à la Michael Mann ou à la Kathryn Bigelow (Blue Steel, sans doute à réévaluer), avec certes moins de Maestria en termes de mise en scène pure. La réalisatrice s’aventure dans un genre cinématographique dans lequel ne s’expriment quasiment que des hommes.

Et puis il y a quelque chose de singulier dans ce film, une volonté de montrer le coût réel d’une erreur. La réalisatrice met les doigts dans la plaie à vif, encore et encore. Cette obstination, cette fascination laisse à penser que Karyn « Girlfight » Kusama reste une réalisatrice à suivre. Et qui lui faudrait filmer quelque chose de plus conséquent que le concept « enlaidir Nicole Kidman pour montrer que c’est une putain d’actrice ».