Downsizing, Alexander Payne (2017)


Un américain moyen un peu concon (Matt Damon, impeccable, comme souvent) découvre ébahi (comme une grande partie de l’humanité), un procédé scientifique norvégien qui permet de réduire les êtres humains à une dizaine de centimètres de haut. Quelle chouette idée pour la planète, surtout qu’avec 125 000 dollars on peut vivre comme si on en avait 12,5 millions. Cerise sur le gâteau : dans les villes de « petits », il n’y a pas de crime. Bon il n’y a visiblement que des avantages. Après les quelques hésitations d’usage, Paul Safranek (puisque c’est son nom) convainc sa femme de faire le grand saut vers le monde des petits. On rase tout ce petit monde, on leur enlève les couronnes dentaires et autres plombages qui pourraient leur faire exploser la tête (ce qui serait fâcheux) et Paul… se réveille seul. Sa femme n’a pas réussi à aller jusqu’au bout du procédé (visiblement le rasage total de la tête n’est pas passé – ah, ces femmes, comme elles sont superficielles, même quand l’avenir de la planète est en jeu). Commence alors pour Paul une nouvelle vie de célibataire qui va lui faire rencontrer un trafiquant fêtard (incarné par Christoph Waltz, en roue libre) et une femme de chambre unijambiste d’origine vietnamienne, ancienne activiste écologique torturée dans son pays.

Downsizing est plein d’idées drôles (le premier réflexe de Paul après avoir été réduit est de vérifier la taille de son sexe, ou en tout cas que le matos est toujours au bon endroit). Le film possède quelques dialogues assez savoureux:

Ngoc Lan Tran: Other night on boat, what kind of fuck you give me?

Paul Safranek: What?

Ngoc Lan Tran: What kind of fuck you give me?

Paul Safranek: What kind? I don’t…

Ngoc Lan Tran: American people, eight kind of fuck. Love fuck, hate fuck, sex-only fuck, break-up fuck, make-up fuck, drunk fuck, buddy fuck, pity fuck.

Mais le film brasse tellement de sujets (l’écologie, l’économie, l’éco-anxiété, la lutte des classes, le handicap, l’engagement politique, la recherche du bonheur) qu’en fait, il n’en traite aucun de façon vraiment concluante. Très long (2h15), proche du Dont’ look up ! d’Adam McKay, il est à mon sens moins réussi. L’histoire d’amour entre Paul et sa réfugiée vietnamienne n’est pas des plus convaincantes ; c’est sans doute ce qui fragilise le plus le film, puisque toute sa seconde partie tient justement là-dessus.

De si jolis chevaux, Billy Bob Thornton (2000)

Passion torride au ranch mexicain

(Passion brûlante dans le ranch Nalgas bonitas – Harlequin 843.)


John Grady Cole (Matt Damon, falot) et son ami Lacey Rawlins (Henry Thomas, sous-employé) s’imaginent comme les derniers cow-boys (nous sommes aux USA à la fin des années 40). Ils partent donc au Mexique, travailler dans un immense ranch. Leur truc ce sont les chevaux, qu’ils dressent avec un talent indéniable. Pour être franc, c’est surtout John qui a le sens des chevaux. Mais voilà que ce demi-puceau tombe amoureux d’Alejandra (Penelope Cruz, très pub espagnole pour cosmétiques hors-de-prix), la fille du riche propriétaire mexicain. Un drame est en marche.

Ce film, je l’ai vu au cinéma quand il est sorti. J’avais lu le livre avant et je l’avais adoré ; je me souviens bien c’était un Actes Sud dans ce format étroit qu’ils ont fini par abandonner, me semble-t-il. Ce livre, je l’ai offert à plusieurs reprises dans ma vie (pour constater au final qu’en termes de technique de drague c’est très approximatif). A l’époque (circa 2001) je n’avais pas aimé le film. Vingt ans plus tard, trouvant le DVD a vil prix dans un bac d’occasions, je me suis dit que j’allais retenter l’expérience. Des fois, et je n’ai jamais trop compris pourquoi, on passe à côté d’un film. On le revoit et boum! on découvre que c’était en fait un chef d’œuvre. Soyons clairs : ça n’arrive pas souvent.

Visiblement Billy Bob Thornton et moi n’avons pas lu le même livre. De si jolis chevaux est un roman âpre, puissant, orageux, traversé par des fulgurances métaphysiques sur la vie, la mort, l’amour et évidemment (on est chez Cormac McCarthy) Dieu. Les dialogues sont typiques de l’auteur. Le film, lui, c’est une espèce de romance hollywoodienne avec de jolis chevaux, de beaux couchers de soleil et une histoire d’amour hollywood chewing-gum qui finit mal. OK… il y a comme un gouffre là. Quant à la scène la plus terrible du livre, une scène qui vous noue les tripes et que vous n’oublierez jamais… Dans le film, c’est juste un sparadrap qu’on arrache, et encore, un petit sparadrap. C’est anecdotique. Voilà, j’ai trouvé le bon mot, d’un chef d’œuvre de la littérature, Billy Bob Thornton a tiré un film au mieux anecdotique.

« T’as fait quoi ce week-end ?

– J’ai regardé De si jolis chevaux en DVD, c’était vraiment pas top. »