L’Emprise, Sidney J. Furie (1982)


Carla Moran (Barbara Hershey, excellente, et à poil… soit dit en passant) est la mère de trois enfants. Billy, adulte, né d’une aventure alors qu’elle n’avait seulement que 16 ans. Puis deux filles plus jeunes, issues d’une autre union un peu plus stable, mais guère plus. Carla étudie la dactylographie pour trouver un meilleur travail, avoir un meilleur salaire. Un soir, elle est violée, par… elle ne sait pas, une entité, une chose, puissante et invisible. Une autre fois, deux créatures semblent lui tenir les jambes, pendant que la grande la pènètre. Elle s’adresse à un psychiatre, le docteur Sneiderman (Ron Silver, intense, y compris dans sa mufflerie), pour avoir de l’aide. Mais il ne la croit pas, pense qu’elle est malade. Et les viols continuent, jusqu’au jour où un témoin permet à Carla d’aller de l’avant, de prendre son destin en mains, si tant est que ça soit possible.

L’Emprise (titre français idiot, le film s’appelle The Entity en VO) est un classique de l’horreur, salué par d’immenses réalisateurs dont Martin Scorsese. Plus de quarante ans après sa sortie, il n’a pas beaucoup vieilli et reste particulièrement marquant. D’abord parce que Barbara Herhsey déchire tout en mère de famille violée. Sa descente aux enfers est particulièrement bien retranscrite : proches qui ne la croient pas, médecins qui veulent l’interner, etc. S’ajoutent à cela les scènes de viol, ses seins martyrisés, sa nudité frontale, symbole de son extrême vulnérabilité.

Là ou le film prend une tournure inattendue, c’est avec l’arrivée de scientifiques de l’Université de Californie et non d’un exorciste ou d’un médium. D’un seul coup, toute une équipe de chercheurs s’occupe de Carla ; ils doutent, bien évidemment, mais ils l’écoutent, l’aident (vraiment) et finissent par la croire.

Ce film est tiré d’un roman, lui-même inspiré de l’affaire Doris Bither.

Le film est particulièrement choquant, il y a non seulement les scènes de viol (répétées), mais aussi le sort réservé à une femme qui se dit violée, la façon dont son entourage réagit, ce qui est sans doute le pire dans l’histoire, ce manque de soutien. Il y a aussi cette scène d’anthologie où Carla, endormie, a un orgasme. Il y a peu Brigitte Lahaie a pris cher (médiatiquement) en rappelant qu’une femme peut avoir un orgasme spontané lors d’un viol. C’est malheureusement un fait scientifiquement avéré (d’un point de vue purement médical, l’orgasme est un réflexe) et il n’y avait sans doute pas matière à polémiquer à ce sujet. D’ailleurs, ce petit bouquin de Brigitte Lahaie est tout à fait recommandable (disclaimer : je suis salarié de la maison d’édition depuis 2017).

L’Emprise est vraiment un monument, ne serait-ce que pour l’interprétation « complète » de Barbara Hershey, tour à tour, victime, mère, amie, amante, objet de toutes les attentions, guerrière…

Late Nite with the Devil, Cameron & Colin Cairnes, 2023


Le présentateur vedette Jack Delroy est l’éternel second des fins de soirées, toujours détrôné par l’indétrônable The Night Show de Johnny Carson. Alors qu’il vient de perdre sa femme, emportée par un cancer des poumons foudroyant, Jack s’enfonce dans les profondeurs fauchées de l’audimat et finit par prendre une pause d’un an. Quand il revient, regonflé à bloc, c’est pour mettre sur les rails l’émission qui le rendra célèbre à jamais, une spéciale Halloween 1977, avec un pathétique télépathe de salle des fêtes provinciale, Christou, un hypnotiseur devenu débunker professionnel, Carmichael Haig, une docteure en parapsychologie et sa jeune patiente possédée par un démon mineur au service d’Abraxas.

Évidemment, rien ne va se passer comme prévu.

Voilà un petit film d’horreur (le budget est inconnu, en tout cas je ne l’ai trouvé mentionné nul part) avec des acteurs inconnus qui m’a plus qu’agréablement surpris. Au début, avec la prestation embarrassante de « Christou », on se dit que « mouais bof, c’est un peu pourling votre truc », puis, le show part en sucette et toutes les questions éthiques et autres sont soulevées, souvent par des moyens détournés. Quant aux cinq dernière minutes, c’est une folie maîtrisée, complètement réjouissante. En grand connaisseur du genre, Cameron & Colin Cairnes multiplient les allusions aux classiques comme Amityville, Scanners, L’Exorciste.

Vraiment très chouette ; je me suis amusé comme un fou ; je vais suivre ces réalisateurs de près.

(Film visionné en blu-ray zone B, langue anglaise, sous-titres français.)