The Goddamned tome 1, Jason Aaron (scénario) & R.M Guéra (dessins)


Depuis 1600 ans, Caïn, fils d’Adam et Eve, inventeur du meurtre, parcourt la terre.

Il cherche à mourir, lui qui a été maudit par Dieu pour avoir répandu la violence sur le monde en tuant son frère. Aucun homme, aucune bête ne vient à bout de son existence. Il s’est jeté dans un volcan et a été recraché brûlé et couvert de croutes. Puis comme d’habitude, il a fini par guérir.

Alors que le monde n’est plus que désolation, boue et merde, sa route va lui faire croiser celle d’une femme désespérée qui recherche son fils Lodo.

Putain, la claque !

Cette réécriture punk et complètement décomplexée de l’Ancien Testament envoie du bois et pas pour rire. Aaron (Scalped) ne respecte rien, il mélange les humains et les dinosaures, l’âge du fer et l’âge de pierre. Les dialogues sont anachroniques, on les verrait plus dans un Mad Max philippin filmé pour 800 pétrodollars que dans une BD qui parle de Dieu, Caïn, les Néphilims et j’en passe.

Le dessin lui aussi envoie du bois et s’il fait immanquablement penser à Druillet dans sa période « le diable est dans tous les détails », on pense aussi à Richard Corben. Un cocktail Druillet, Corben, je meurs.

Putain, la claque !

Heureusement que mon don de clairvoyance m’a poussé à acheter les deux tomes ensemble.

L’Arc, Kim Ki-duk (2005)


Sur son bateau, un vieil homme armé d’un arc traditionnel (on ne saura jamais son nom) fait venir des hommes pour pêcher à la ligne.
Tous sont fascinés par la jeune fille de 16 ans qui ne parle pas et vit avec lui.
Ils la croient muette ; elle ne l’est pas.
On dit qu’il peut prédire l’avenir et si c’était elle ?
Tous sont choqués car le vieil homme va épouser l’adolescente quand elle aura dix-sept ans.
Un jeune étudiant s’en mêle, d’abord en offrant un walkman à la jeune fille, puis en voulant connaître son histoire. Évidemment en se rapprochant trop de la propriété du vieil homme, il va provoquer un drame.

Kim Ki-duk c’est toujours pile ou face avec moi. Là j’avoue que j’ai été impressionné par la beauté plastique du film, les émotions contradictoires qu’il provoque. Les jugements moraux qu’il appelle (un homme peut-il posséder une femme comme si c’était un objet ? Évidemment, non. Mais est-ce si simple que cela dans certaines cultures ?). C’est clairement un film qui met mal à l’aise. C’est surtout un conte, on retrouve d’ailleurs des motifs emblématiques des contes populaires avant qu’ils ne fussent assagis par Disney.

Cruel, pervers, violent, épuré, magnifique. Et très perturbant.

Missouri Breaks, Arthur Penn (1976)


Excédé par ses pertes, un propriétaire terrien, David Braxton, fait pendre un jeune voleur de chevaux appartenant à la bande de Tom Logan (Jack Nicholson). Ce dernier décide de se venger et achète un ranch tout près du domaine Braxton. Pour mettre fin à l’engrenage de cette vengeance, Braxton engage un régulateur : Lee Clayton (Marlon Brando). Pendant ce temps, la jeune Jane Braxton se rapproche (tout proche) de Tom Logan.

Missouri Breaks c’est le film que je croyais avoir vu, mais qu’en fait je confondais avec un autre. Et donc je l’ai découvert ces jours-ci et je n’ai pas été déçu du voyage (pour tout dire, je l’ai vu deux fois en deux jours, je me lasse pas de la scène des « chauve-souris »).
Ceux qui se souviennent bien de Little Big Man du même Arthur Penn ne seront pas surpris par le mélange de drame et de comédie. C’est même loufoque, par moments, enfin loufoque je ne sais pas si c’est le bon adjectif. Décalé ? Marlon Brando est en roue libre totale, un peu comme s’il s’était réveillé un jour et avait décidé qu’il était indien et que sa peau blanche et ses cheveux blancs étaient un camouflage. Puis qu’il était une vieille femme obèse, genre La petite maison dans la prairie après trois tartes aux myrtilles. Il y a une ou deux scènes d’anthologie. Notamment celle où Jane aimerait bien se faire prendre sauvagement par un homme qui sent la sueur et le cheval (ou l’inverse) et se heurte à un Jack Nicholson assez moyennement motivé, il faut bien le dire.
Le film est très impressionnant dans sa mise en scène : Arthur Penn osant des ellipses assez incroyables (il y en a une, tellement audacieuse, je m’en remets pas, en même temps je suis très sensible dans mon genre). Toute une partie de l’action est hors-champ, voire retirée du récit.

Je ne sais si on peut parler de western crépusculaire, mais en 1976 le genre était quasiment mort et enterré. Arthur Penn en fait autre chose. Franchement, rien que pour la prestation de Marlon Brando, vous pouvez y aller. Vous n’oublierez jamais la parabole des chauve-souris.

Bacurau, Kleber Mendonça Filho & Juliano Dornelles (2019)


Bacurau, village isolé de la savane Brésilienne, futur proche.

Alors que l’eau potable est devenue un véritable enjeu, que les élections locales approchent, des funérailles sont organisées dans le village de Bacurau. Carmelita, 94 ans, vient de mourir. Et certaines personnes sont revenues au village pour la cérémonie. Peu de temps après, d’étranges événements ont lieu à Bacurau et dans ses alentours : le réseau internet est coupé. Le village disparaît de google maps. Le camion d’eau potable est criblé de balles. Un couple en motos se ballade dans le coin. Un ovni est aperçu dans le ciel. Puis une famille de cinq personnes est massacrée dans une ferme. Première étape d’un déferlement de violence.

Quelqu’un menace Bacurau. Qui ? Pourquoi ?

[3615 my life] C’est l’autrice anglaise Stark Holborn qui m’a conseillé ce film, dont très honnêtement je n’avais jamais entendu parler, malgré son prix à Cannes. [/3615 my life]

Bon, je ne savais pas à quoi m’attendre et ça a été la gifle monumentale. Franchement ce film est incroyable, hallucinant, c’est à la fois un film « à la Kusturica » mais au Brésil (je me comprends, c’est l’essentiel) et un film de genre qui assume totalement son hommage à John Carpenter (comme le prouve la musique, lors d’une des scènes). On pense surtout à Assaut. Sexe, violence, crâne explosé filmé en gros plan, décapitations… le moins qu’on puisse dire c’est que les dix premières minutes du film, presque documentaires, ne préparent pas à ce qui va suivre. Le spectacle dure 2h10, mais personnellement j’en aurais bien pris une heure de plus.

Stark m’a dit : « c’est comme si dans les Sept samouraïs les villageois prenaient les armes au lieu d’engager des samouraïs. »

Comment cet OVNI sexy&ultraviolent (et parfois de très mauvais goût, soyons clairs) a pu avoir un prix à Cannes ? Franchement c’est la vraie question.

Arrêtez tout, jetez vous dessus !

Bandolero !, Andrew V. McLaglen (1968)


Dee Bishop (Dean Martin) et sa bande braquent la banque de Val Verde. L’affaire tourne vinaigre et un riche propriétaire terrien est abattu devant les yeux de son épouse (Raquel Welch). Le shériff intervient, au fusil de chasse, et les bandits sont emprisonnés. Le jour de leur pendaison, surprise !, ils sont libérés par leur énigmatique bourreau (James Stewart). Tout le monde s’enfuit au Mexique, non sans kidnapper en chemin la belle Maria Stoner. Aussitôt, le shériff de Val Verde, amoureux depuis toujours de la jeune veuve, se lance à leur poursuite, accompagné de dix hommes. L’affrontement aura lieu sur le territoire des terribles Bandoleros.

Quand j’étais gamin, j’adorais les westerns et les grands films d’aventure américains. J’avais mes acteurs préférés : sans doute dans l’ordre, Steve McQueen, le roi du cool (pour La Grande évasion), Robert Mitchum (pour La Rivière sans retour), Richard Widmark (pour Alamo), Kirk Douglas (pour Les Vikings), Sidney Poitier (pour Dans la chaleur de la nuit) et il y avait cet acteur dont j’étais infoutu de me souvenir du nom, mais que j’aimais beaucoup. « C’est James Stewart », me disait ma mère, quand un film avec James Stewart passait à la télé. J’aimais beaucoup James Stewart (L’Homme de la plaine) et un jour, ce fut le drame, mes parents m’interdirent de voir Bandolero !, j’étais tout gamin, c’était un western et je ne comprenais pas bien ce que Bandolero ! pouvait contenir de suffisamment scandaleux pour provoquer un interdit parental. Donc ce fut interdit et je dus attendre longtemps pour voir Bandolero !

Je ne sais pas si c’est un bon film, Dean Martin est à côté de son rôle, il a été meilleur notamment dans le mythique Rio Bravo. Digression : mon père adorait John Wayne, on ne ratait jamais un John Wayne à la télé, y compris Alamo qui m’avait à moitié traumatisé la première fois (il m’était alors totalement impossible de penser que John Wayne pouvait mourir à l’écran). Mais revenons à Bandolero !, c’est un western qui, à un ou deux détails près, aurait presque pu être tourné par Sam Peckinpah (qui n’aurait probablement pas proposé le rôle de Dee Bishop à Dean Martin). On y voit l’influence de Sergio Leone, l’influence d’Ennio Morricone sur la musique de Jerry Goldsmith. Les protagonistes principaux sont des bandits. Le « méchant » qui est tout sauf un méchant homme est un shériff, mais aussi un amoureux éconduit. Raquel Welch en 1968 était la plus belle femme du Monde, en tout cas au sud et au nord du Rio Grande. Et la fin ! Mon Dieu, mais quelle fin !

Il faut peut-être le regarder avec une légère indulgence, se dire que tout ça n’est pas forcément très sérieux, mais bon la promenade au Mexique est envoutante et le film a d’étranges accents de slasher avant l’heure.

Malgré tous ses défauts, j’aime beaucoup Bandolero !